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    - Je n’ai pas besoin de vous ! Pesta l’homme occasionnellement interné à l’hôpital Sainte-Anne dans Paris. Ces quelques mots étaient les seuls qu’il avait osé sortir depuis le début de ses consultations.

    - Vous quitterez ce lieu quand nous vous en jugerons apte Monsieur Bourgeois, répondit calmement le psychiatre, à l’homme éternellement blottit au fond de la pièce.

    - Je n’ai pas besoin de vous ! Répéta-t-il convaincu de sa propre lucidité. Mais l’homme en blouse blanche n’était pas dupe, son patient ne parlait pas et ne racontait rien, peu importe les moyens utilisés. Il n’ouvrait la bouche que pour crier qu’il allait bien et qu’il voulait partir de ce lieu le rendant fou.

    Pensant faire son travail, le psychiatre préférait désormais ignorer les remarques de son interlocuteur, il préférait qu’il garde sa salive pour parler de choses pouvant l’aider à en déterminer les troubles.

    -Je n’ai pas besoin de vous ! Je n’ai pas besoin de vous ! Ne cessa-t-il de répéter, tel un enfant en colère. Il continuait à crier ses quelques mots quand le médecin se posa accroupit face à lui, le regardant dans les yeux avant de lui dire vicieusement : « Comment va votre femme ? ». Sur ces mots Frédéric stoppa ses cries avant de se blottir de nouveau contre le mur. Satisfait d’avoir réussit à calmer son patient, le médecin continua : « Nous avons tout votre dossier médicale et juridique Monsieur Bourgeois. Ici vous pouvez nous parler de ce que vous souhaitez, il n’y a rien à cacher, c’est inutile de vous protéger en vous taisant ou même de vous cacher contre ce mur. ».

    Frédéric avait parfaitement conscience de ce que son médecin était en train de lui dire. Il le regardait sans parler, honteux de la situation et de son passé. Il se sentait comme violé dans son intimité, c’était son secret et personne n’aurait dû le connaitre. Personne ne devait en parler, il ne voulait pas en entendre parler, car l’entendre lui faisait avouer à lui-même la vérité. Sa propre vérité le tuait.

                Comprenant que son patient était bouleversé, le Docteur Fontaine décida de le laisser réfléchir. Le laisser seule face à sa propre solitude. Il resta alors un moment dans la même position, le regard dans le vide, se reprenant cette même claque à chaque fois qu’on lui avouait la vérité. Petit à petit ses yeux s’humidifièrent et il ne tarda pas à s’allonger sur le sol glacé, inerte dans sa douleur.

    Et il restait là, sur son sol, espérant que quelqu’un viendrait le voir, lui parler sans le voir comme quelqu’un parmi tant d’autre. Quelqu’un qui ne le verrait pas comme un simple patient. Il espérait que quelqu’un viendrait l’aider, lui tendrait la main afin qu’il se relève, sans que cela soit dans l’intérêt de son métier. Il aurait souhaité une chaleur humaine, là, tout de suite, le serrant dans ses bras. Il resterait là à attendre cette personne, peu importe le temps qu’il faudrait. Il ne vivrait point cet instant comme un écoulement ou une quelconque perte de temps, puisqu’il était comme mort.  


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    - Pourrais-je avoir une cigarette, s’il vous plait ? Demanda timidement Frédéric toujours dans cette éternelle chambre le rendant si livide. Il était encore sur ce sol gelé à chercher un quelconque réconfort.

    - Il est interdit de fumer ici répondit simplement une infirmière

    - S’il vous plait... Supplia Frédéric

    - Non, en revanche nous avons des patchs si vous le souhaitez.

    - Non, je veux le gout chaleureux de mon tabac, je veux que vous me laissiez tranquille, je sais qui je suis et où je vais, et ce que je vais devenir ne vous regarde pas, je veux choisir ce qui est bon pour mon corps !

    - Je suis désolé, les règles sont les règles Monsieur Bourgeois.

    - Monsieur Bourgeois n’existe plus… souffla-t-il agonisant.

    - Aller vous couchez, le docteur passera dans la journée.

    - Ce n’est qu’une identité… ce n’est pas moi…, Continua-t-il convaincu que quelqu’un l’écoutait attentivement.

    - A plus tard Monsieur,  mit fin à ce dialogue de sourd l’infirmière.

     

    Et cela faisait plusieurs séances que Frédéric stagnait, voir qu’il reculait. Alors que son psychiatre tentait d’analyser une quelconque chose, continuant de lui parler en espérant une réponse, Frédéric était toujours là, allongé sur ce sol givré, le cœur et le regard vide.

    Finalement, les médecins abdiquèrent et laissèrent entrer cette femme qui restait à attendre dans la salle d’attente, espérant négocier rendre une simple visite à son ami. Elle rentra donc dans cette petite pièce où l’ambiance était déjà glacée.

    - Fred… tenta-t-elle en s’approchant de son ami inerte sur ce sol. Celui-ci sursauta dès lors qu’elle posa sa main sur son épaule. Il bafouilla un « lâche ! Lâchez-moi ! ».

    - C’est moi, murmura-t-elle doucement ayant peur d’effrayer son ami qui lui paraissait si faible et déshumanisé. Elle ne savait pas comment se comporter avec lui vu son état. Elle aurait souhaité le prendre dans ses bras et le consoler lui faisant comprendre qu’il n’était pas seul. Mais comprenant la pathologie de Frédéric, elle comprit qu’un contact le détruirait. Prisonnier de sa propre contradiction, Frédéric ne répondit pas aux quelques mots de Claire. « Comment vas-tu ? » Continua-t-elle, « Tu ne veux pas dormir sur le matelas ? » « Tu n’as pas mangé ? » questionna-t-elle après avoir vu l’assiette froide de la veille encore remplie à quelques mètres de là. Mais peu importe ce qu’elle proposait comme question, il ne répondait pas. Il ne la regardait même pas. Allongé sur ce sol, dos à elle. Mais elle continuait de parler, car elle souhaiter faire comprendre à son ami qu’il n’était pas seul. Peu importe le passé mystérieux qu’il avait pu subir.

    Mais au bout de plusieurs heures, une infirmière pénétra dans la pièce où le silence régnait malgré la présence des deux protagonistes. Elle demandait à Claire de sortir de cette pièce, car l’heure des visites venaient d’être dépasser. Claire acquiesça tout de même heureuse d’avoir pu voir un peu son ami.

    Elle se leva alors rapidement mais trébucha sur cette assiette encore pleine. Son corps s’écrasa au sol provoquant un lourd bruit dans la petite pièce. « ARRETE ! ARRETE ! ARRETE ! LAISSE LA TRANQUILLE ! » S’écria subitement Frédéric suite à ce bruit dans la pièce. Elle se tourna brusquement vers lui, ne comprenant que trop la situation. Les muscles de Frédéric étaient contracté, il était évident qu’il ne les contrôlait pas. Son cou était également tordu, et il sanglotait et convulsait légèrement, en répétant les quelques mots qu’il avait criait quelques secondes avant.

    Claire assistait à ce dur spectacle, ne sachant que trop faire. Tentant de comprendre son ami, elle  se releva et retomba volontairement au sol, simulant le bruit qui avait déclenché la crise d’hystérie de Frédéric. « LAISSE LAETITIA TRANQUILLE ! LAISSE-LA ! TU LE REGRETTERAS ENFOIRE ! ENFOIRE TU VAS LA TUER ! ARRETE ! ARRETE ! ARRETE ! Calme-toi… » Continua de crier l’homme agonisant de souffrance et de remords au sol.

    Mais vicieusement, Claire se releva une deuxième fois pour retomber au sol, sceptique de cette scène. Mais il s’écria de nouveau à en perdre la voix « TU VAS LA TUER ENFOIRE ! TROP TARD ! TU L’AS TUEE ! ELLE EST PARTIE ! TU NE PEUX EN VOULOIR QU’A TOI ! Tout ce qui t’appartenais, vient de s’évaporer… Enfoiré… » .

    Mais les médecins entrèrent dans la pièce après avoir entendu les cris de l’homme y logeant. Claire était toujours sur le sol, ne comprenant pas les paroles de Frédéric. Les médecins la tirèrent hors de la chambre.


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